Portrait de M.Rivaton - Crédit photo Matinales Construction & Logement

Immobilier, logement, construction…comment sortir de l’impasse ?

La crise du logement et de l’immobilier que connaît la France depuis plusieurs années est pour l’instant sans solution. Robin Rivaton estime cependant qu’il est possible de débloquer la situation.

Robin Rivaton

Entrepreneur et essayiste, spécialiste des questions de l'immobilier et des nouvelles technologies.

Comment décririez-vous la situation du logement en France aujourd’hui ?

Robin RIVATON Comme d’autres pays européens, la France traverse actuellement une double crise du logement : de l’offre locative et de l’accession à la propriété immobilière. Il est aujourd’hui difficile de trouver un logement correspondant à ses besoins, près de son lieu de travail, dans un cadre agréable, et surtout à un prix abordable. Nombre de nos compatriotes consacrent une part importante de leurs revenus au paiement de loyers ou de crédits immobiliers, à l’origine d’une baisse ressentie de leur pouvoir d’achat. Il est aussi de plus en plus difficile pour les Français d’accéder à la propriété, la hausse des taux d’intérêt intervenue depuis deux ans ayant accentué des difficultés préexistantes. La France n’est plus le pays de propriétaires qu’elle a un jour été. En 2023, 57 % des ménages métropolitains sont propriétaires de leur résidence principale. Cette proportion de la population est figée depuis 2006, alors même que la France a connu les taux d’intérêt les plus bas de l’histoire économique moderne. Plus encore, la France est l’un des pays qui présentent le plus fort écart de propriété entre les ménages les moins aisés et les plus aisés, alimentant la fracture sociale. Alors que les parcours d’accession à la propriété sont bloqués, les personnes restent locataires plus longtemps, en empêchant d’autres (étudiants qui quittent le foyer, ménages divorcés…) de trouver des logements. Pour beaucoup, cette double crise du logement est une réalité depuis bien longtemps : autant louer qu’acheter son logement sont devenus bien trop peu accessibles.

Quelle est la solution pour sortir de la crise ?

Robin RIVATON Il est temps de penser des réformes structurantes du secteur du logement plutôt que de poursuivre l’empilement de micro réformes qui s’accumulent sans grands résultats. Avant tout, il importe de construire enfin davantage de logements pour répondre aux besoins réels des Français. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas : nous produisons 250 000 logements nets supplémentaires par an, là où il en faudrait 450 000. Ce besoin continuera de croître avec le retrait du marché locatif des logement considérés comme des passoires énergétiques du fait de leur diagnostic de performance énergétique (DPE). Il est donc plus que jamais nécessaire de créer les conditions d’un « choc d’offre » pour mieux loger les Français, en particulier les classes moyennes. Il s’agit de nous mettre collectivement en capacité de construire tous les types de logements : des logements sociaux, des logements intermédiaires, des logements libres.

Comment financer toute cette construction ?

Robin RIVATON L’épargne privée est une source de financement qu’il est nécessaire de mobiliser pour accélérer cette dynamique de construction. L’investissement immobilier responsable a en cela un rôle déterminant à jouer : il peut faire contribuer plus directement l’épargne des Français à la construction d’une offre résidentielle plus fournie et adaptée. Par-delà le choc de l’offre, l’accès au logement pour tous les Français doit être facilité. Aucune piste n’est à exclure, et surtout pas celle d’une réforme de la fiscalité du logement. En France, cette fiscalité est reconnue comme inefficace économiquement : elle frappe en proportion équivalente le flux (TVA sur les logements neufs et droit de mutation) et le stock (taxes foncières). Jusqu’à quatre fois ceux constatés au Royaume-Uni ou au Pays-Bas, les droits de mutation à titre onéreux (DMTO) tendent à ralentir le rythme des transactions immobilières, les acheteurs se laissant le temps d’absorber financièrement le montant des droits de mutations et des frais de transaction. C’est pourquoi je plaide, depuis longtemps, pour une refonte de cette fiscalité par la création d’un impôt foncier unique avec un barème progressif, à partir des travaux des économistes Alain Trannoy et Guillaume Bérard de 2019. Moins désincitatif, cet impôt serait plus juste économiquement et socialement.