Le climat est l’une des trois priorités du plan stratégique BPCE 2024. Comment cela se traduit-il en termes d’actions et d’engagements ?
Valérie Derambure : Le climat est en effet le défi majeur de notre époque et nous le plaçons comme priorité d’action dans tous nos métiers et toutes nos entreprises. Le Groupe BPCE s’engage à progressivement aligner son bilan bancaire sur une trajectoire neutralité carbone « Net Zéro », qui permettrait de limiter à 1,5° le réchauffement climatique à l’horizon 2100.
Or, la tendance actuelle des émissions de GES nous conduirait vers un réchauffement d’au moins 4° à ce même horizon. Notre objectif est très ambitieux et nous avons été l’un des tout premiers acteurs bancaires à nous fixer des jalons à court, moyen et long terme pour y arriver. Aligner ces portefeuilles sur une trajectoire « Net Zéro » signifie que nous allons mesurer leur empreinte carbone, afin de prioriser l’alignement des secteurs les plus émissifs en gaz à effet de serre, comme le charbon et les hydrocarbures, la production d’énergie ou encore les transports.
En évaluant de manière fine l’impact de nos financements sur le climat, nous pourrons d’une part réduire progressivement la part des financements les plus émissifs – sans pour autant arrêter de financer du jour au lendemain des pans entiers de l’économie car nous sommes vigilants à inscrire notre action dans le cadre d’une transition juste – et d’autre part accompagner nos clients dans leur propre transition environnementale. C’est un autre engagement prioritaire de notre stratégie.
Comment faites-vous pour évaluer cette empreinte environnementale ? Disposez-vous de données suffisantes ?
Valérie Derambure : A ce jour, il n’y a pas de méthode de place, même si des cadres méthodologiques et des bonnes pratiques commencent à émerger. Pour être en capacité de mesurer et suivre le profil carbone de ses portefeuilles, BPCE a construit une démarche d’évaluation climatique dite « Green Evaluation Models ». Il s’agit à la fois d’évaluer l’empreinte et de noter l’impact climat des biens, des projets et des clients que nous finançons.
Pour l’heure, la situation est inconfortable car il n’existe pas de méthodologie de place d’évaluation des émissions financées alors que nous subissons une pression de plus en plus forte, des ONG entre autres, pour publier des données… Cette question des indicateurs, des données financières et de la qualité de l’information est cruciale.
Les attentes de toutes nos parties prenantes (au premier rang desquelles les investisseurs et les superviseurs) sont fortes. Ce qui explique que le contexte réglementaire soit chargé, notamment au niveau européen. En particulier, la taxonomie, qui définit les activités durables sur le plan environnemental, a introduit le « Green Asset Ratio ». Il s’agit d’un indicateur de performance mesurant la part du portefeuille bancaire associée à des activités économiques respectueuses de l’environnement. De plus en plus, les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance, que l’on résume couramment par l’acronyme « ESG » vont être pris en compte dans la manière dont nous serons jugés par le régulateur, par toutes nos parties prenantes, et plus largement par la société.
Pour nos clients particuliers, comment comptez-vous avancer ?
Valérie Derambure : Pour nos clients particuliers, nous adressons en priorité le sujet des crédits immobiliers. Leurs encours représentent un tiers du bilan du groupe, c’est considérable. Nous sommes aujourd’hui capables de mesurer l’empreinte carbone de tout notre portefeuille de financement immobilier et d’établir une « cartographie » qui ventile ces crédits selon la performance énergétique des biens financés, et ce pour chaque établissement du groupe.
La bonne nouvelle, c’est que les émissions de GES induites par cette activité sont très faibles, comparativement au portefeuille de grande clientèle. Si l’enjeu est moins prégnant en termes de CO2 pour cette activité, il reste néanmoins significatif et nous luttons contre le dérèglement climatique en proposant des prêts rénovation énergétique aux propriétaires ou futurs acquéreurs des « passoires thermiques ». Il faut néanmoins avoir conscience que nos clients les plus modestes n’ont pas les moyens d’acheter des logements économes énergétiquement ou de financer la rénovation de leur habitat.
En tant que banque coopérative, nous nous devons de trouver des solutions.